Entrée Bruillante

Karolyn était allé rejoindre des amis très tôt en ville ce soir là et comme de raison avait commencé à boire tôt. Elle avait aussi décidé de ne pas dire à sa sœur ou à Yzik ou elle allait n’y avec qui elle sortait. Elle se disait que ça ne les concernait pas. Et puis qu’est ce que ça pouvait bien leur faire avec qui elle se soulait. Rien du tout!! Elle avait été rejoindre tout le monde dans le quartier anglais de la ville et avait fait la fête toute la nuit. Essayant de son mieux de mettre Craig et Yzik derrière elle. Ainsi que toute cette histoire de guerre. Pour une soirée, elle n’était pas une fondatrice. Elle n’était qu’une fille normale faisant la fête avec des friend anglais. Demain se serait chez les Français. Elle réduisait ses interventions en tant que Fondatrice au minimum. Elle en avait assez de devoir se battre seule contre une armée. Alors elle avait abandonné comme un peu tout le monde. Autant il y a un an, elle était passionnée par cette même guerre. Ce laissant à tête première entre les deux camps sans penser aux conséquences. Les conséquences que ça avaient eues pour elle et Craig. Elle n’était même plus capable de le regarder en face maintenant.

Se retournant brusquement, elle piqua la bouteille de vodka au gars près d’elle et en prit une longue gorgée à même le goulot. Elle ne voulait pas penser à ce qui s’était passé ce soir là. Pourtant plus elle essayait d’oublier plus ça la hantait. Elle n’arrivait pas à vivre avec et encore moins à l’effacer. Alors comment faire pour vivre malgré tout? Comment on faisait pour vivre avec les erreurs des autres?

Elle n’était pas soule. En fait, elle n’avait commencé à boire qu’après l’incident. Elle avait organisé une fête au Manoir. Une des meilleures qu’elle n’est organisé toute seule. Et par miracle tout semblait bien aller pour l’instant. Aucune bataille, n’avait éclaté malgré l’heure avancé. Elle se permit alors de se détendre et de faire la fête elle aussi. Laissant la responsabilité de couvrir aux autres fondateurs présents. Cependant quand la première heure du jour sonna, elle s’éclipsa à l’étage, seule. Pour elle ne savait quelle raison, les larmes avaient afflué dans ses yeux. Peut-être que le fait de voir Craig avec une fille l’avait blessé plus qu’elle ne voulait l’admettre. Ils n’avaient jamais explicitement dit qu’ils étaient ensemble après tout. Et avec l’engueulade qu’ils avaient eu la semaine précédente cette option était carrément raillé de la carte. Elle n’y avait pas pensé depuis un moment pourtant, elle avait mal tout de suite. Elle se réfugia dans la bibliothèque, essayant de son mieux de reprendre son calme. Elle ne se permettait aucune faiblesse d’où l’écœurement qu’elle ressentait présentement à son comportement. Elle se mit à faire les cents pas sans prêté attention au bruit extérieur. Elle n’entendit donc pas le jeune homme inconnu entrer. Elle ne le connaissait pas. Étrange pour elle qui connaissait à peu près tout le monde en ville. De toute évidence personne n’entendit ses cris. Ou personne ne prêta attention. Les deux hypothèses étaient possibles. C’est Craig qui l’avait trouvé une heure ou deux plus tard roulé en boule par terre dans un coin. Elle se rappelle encore de la scène comme si c’était hier. Il n’avait fait que passer la tête dans l’entrebâillement de la porte pour lui dire qu’il avait besoin d’elle en bas. Une bagarre avait éclaté. Comme s’il pouvait y avoir une fête à Acadia sans bagarre, mais ils ne descendirent jamais en bas. En la voyant dans cet état, Craig avait préféré la raccompagner dans sa chambre. Il l’avait bordé et était resté avec elle sans dire un mot. Mais ce silence était trop beau pour durée à son avis. Quelques jours plus tard, Craig se mit à lui poser des questions. Elle garda le silence, trop orgueilleuse pour avouer qu’elle avait été faible. Ce n’est qu’après une séance de questionnement intensive qu’elle éclata en sanglot incapable de rester calme et froide plus longtemps. Elle lui raconta. Évitant les détails, mais quand même. Elle se sentait humilié, faible et sale. Elle se sentait encore comme ça un an plus tard. Voilà pourquoi elle évitait Craig et son regard triste, et qu’elle passait quatre-vingt dix pourcents de son temps à faire à fête et se souler. Qu’est qu’on peut faire d’autre quand notre position dans une guerre à causer notre perte?

À bout de force, elle finit par appelé un taxi pour la raccompagner au Manoir. Elle ne rentra qu’aux petites heures du matin, complètement saoule et faisant un boucan d’enfer. Elle abandonna ses talons près de la porte. Il lui avait fallut un bon cinq minutes, seulement pour les enlever. Elle entreprit ensuite de monter l’escalier qui montait à sa chambre. Riant comme une folle toute fois, chaque fois qu’elle devait se raccrocher à la rampe pour ne pas débouler l’escalier au complet. Finalement arrivé au sommet, elle perdit son sourire en tombant face à face avec sa sœur ainée.

-Merde!!

Pour une fille qui gardait son calme en tout temps et qui passait ses journées à empêcher son frère de se battre, Karolyn se fâcha assez rapidement en voyant sa sœur faire la vigie en haut des escaliers.

« Tu peux le dire, merde! Veux-tu bien me dire pourquoi tu rentres à cette heure-ci, et dans cet état? »

-Pour qui tu te prends, Mme-je-suis-trop-asseulée-pour-voir-ce-qui-se-passe-autour-d’elle…En fait, je fais comme toi. Est-ce que tu as compté le nombre de fois que moi et Yzik on a dû te ramasser soule à la fin d’une soirée depuis que les parents sont morts.

Naïvement, Karo pensait que s’était la mort de leurs parents qui avait causé la déchéance de sa sœur. Jamais elle n’aurait pensé que l’ainé Leblanc était à l’origine de ses tourments. Comment aurait-elle pu le savoir ? Jenny avait toujours su garder les jumeaux dans le noir quand à sa vie personnelle.

-Qu’est-ce que ça peut bien te faire que je rentre à cette heure de toute façon ?

Elle bouscula légèrement Jenny en passant à côté d’elle dans le corridor pour pousser la porte de sa chambre avec difficulté dans un soupir digne de l’ivrogne qu’elle était en ce moment.

-Veux dormir, grommela-t-elle en ouvrant finalement sa porte avec fracas et passant à un cheveu de tomber encore une fois. Et puis de toute façon…Je ne suis pas si soule que tu parais le croire.

Elle essayait de se convaincre elle-même à voix haute, mais en vain. Elle était soule et malheureuse et si elle se serait écouté elle se serait blottit dans les bras de Jenny pour pleurer toutes les larmes de son corps. Trop orgueilleuse, elle ne pipa mot et retint les larmes qui menaçaient d’envahir ses yeux d’une seconde à l’autre.

Elle n’avait aucun équilibre en temps normal, alors avec l’alcool elle devenait carrément dangereuse pour elle-même. Elle jeta un regard dans le corridor ou sa sœur se tenait toujours les poings sur les hanches. Karo lui tourna le dos brusquement refusant de lui montrer les larmes qui perlaient dans ses yeux à cet instant. Elle aurait aimé que sa mère soit la présentement. Elle lui manquait comme jamais.

[Désolé pour la minuscule réponse ]

« Comment oses-tu!? »

-Pendant des années j’ai fermé ma gueule. Je me suis contenté d’observer. Sois belle et tais-toi, non ? Mais j’en ai assez de ça. C’est pour ça que j’ose maintenant. Que je me soule tous les soirs et que je me jette au milieu de chaque bataille qui éclate au lycée. Parce que toute ma vie je n’ai jamais osé.

Elle tourna le dos à sa sœur ainée. Honteuse de lui avoir avoué tout ça. Qu’est ce qui lui prenait tout d’un coup ? Elle se demandait si s’était l’alcool qui lui déliait la langue ou la rage qu’elle avait au cœur qui la forçait à parler. Elle était sur le point d’éclater, d’exploser. « J’ai besoin d’un verre » se dit-elle. Elle était déjà soule donc qu’est ce qu’un verre de plus changerait. Elle avait seulement besoin de s’occuper les mains, pensé à autre chose… Peut-être qu’être heureuse serait un changement agréable.

-Tu t’es inquiété ?!! C’est déjà surprenant que tu ais remarqué que je n’étais pas là.

Elle ne se gênait pas vraiment pour sortir la semaine. Pour sécher les cours… Faire ce qu’elle avait envie de faire sans restriction. Sachant très bien que les appels de l’école résonneraient dans une maison vide. Jenny n’était que rarement présente ou trop pris dans sa bulle pour voir ce qui l’entourait. Du moins c’est comme ça qu’elle voyait Jenny. Son point de vue était biaisé évidemment et pas du tout objectif. Elle s’était sentit seule quand elle avait vu sa sœur s’éloigné peu à peu. Elle s’était accrochée de son mieux à Yzik et Craig, mais depuis un an s’était-elle qui s’était éloigné. Elle avait honte et était incapable de regarder les deux jeunes hommes dans les yeux.

Levant les yeux pour regarder par la fenêtre une seconde, son regard croisa ses mains tremblantes. Elle se mit à préparer son lit pour se coucher, replaçant les draps convenablement. Tout à fait inutile comme action, mais elle devait camoufler les tremblements de ses mains. Les larmes remplissaient ses yeux et elle ne se donnait que quelques secondes avant d’éclater en sanglot.

« Tu veux dormir et on en reparle demain? »

-Non, je ne veux pas dormir, cria-t-elle en se retournant brusquement vers Jenny. Je veux pas dormir, je ne veux pas boire, je ne veux pas manger, je ne veux pas parler… Je ne veux pas vivre.

Les larmes contenues depuis trop longtemps se mirent à couler. Karo essaya en vain de les arrêter, mais elle en fut incapable. Elle avait toujours été comme ça. Elle retenait tout en dedans jusqu’au moment ou elle explosait.

Certains disaient que la pire chose dans le fait de vivre éternellement était de devoir vivre avec soi-même. Dans le cas de Karo, une simple journée à contempler ce qu’elle était devenue était insupportable. Elle détestait ce qu’elle était devenue. Si les pierres pouvaient parler…Celles qui se trouvaient au sommet de la chute du diable auraient beaucoup de chose à dire sur la jeune Léger. Elle était certaine que même les pierres avaient pu ressentir son envie d’en finir.

« Je suis ta soeur! Bien sûr que je m'inquiète, bien sûr que j'ai remarqué que tu n'étais pas là! »

-Ah oui !! A lors ou étais-tu la semaine passé quand j’ai été absente pendant presque quarante huit heures d’affilés. Je ne peux pas croire que l’école à ne pas appeler. Et si tu t’es aperçu que j’étais partie ça m’étonne que t’ais rien dit.

Elle était méchante, elle le savait, mais elle avait été trop longtemps ignorée par sa sœur pour maintenant ne pas être amer quand soudainement elle se souciait de son bien-être.

En soi, elle n’avait pas à s’inquiété du voyage qu’elle avait fait la semaine avant. Elle avait rapidement mit Yzik au courant une heure avant de partir avec trois de ses amis. Ils étaient sortit de l’île. Conduisant chacun leur tour pour ne revenir que deux jours plus tard. Ce qui s’était passé pendant le voyage était un secret entre les quatre amis et ils s’étaient juré de n’en parler à personne. Elle avait besoin de dire bien des choses à sa sœur, mais cet épisode elle ne la lui raconterait pas.

Sa vision brouillée par les larmes, elle ne put voir les larmes de sa sœur avant de les entendre dans sa voix.

« Ne dis plus jamais ça, je t'en prie. Je t'en prie... »

Une fois dans les bras de sa sœur, Karo se laissa aller. Ses sanglots redoublèrent et les larmes semblaient intarissables.

« Ça va s'arranger, je suis là maintenant... Je vais être là pour toi, je te le jure, mais ne dit plus ça... »

-C’est là que tu te trompes Jen’. Jamais ça ne s’arrangera. Jamais on ne réussira à arrêter cette guerre. Ça fait des siècles qu’ils essayèrent alors comment nous on le pourrait.

Son attitude de la dernière année face à cette guerre avait beaucoup changé. Elle avait déjà été une fervente activiste chez les Fondateurs. Toujours à essayer de faire la paix partout ou elle allait. Tandis que maintenant, elle se tenait aussi loin que possible de cette guerre et ne se mêlait que très peu des bagarres qui éclatait à l’école, alors qu’avant elle était la première à plonger dans le tas pour séparer tout le monde.

Ça faisait à peu près vingt-cinq ans qu’il n’y avait plus de mort relié à cette guerre entre français et anglais, mais rien n’empêchait des dommages irréparables. Malheureusement les Fondateurs étant pris entre deux feux ils étaient souvent victimes des coups portés aux ennemies.